La cloison, le chantier des archives (2005-2009)
Photographies Arnaud Théval
Commande publique du Conseil Général de Loire-Atlantique pour les Archives départementales.
Un état de crise rythme le temps des Archives lié et éloigné à la fois de celui du chantier. Tout en travaillant, les archivistes doivent réinventer des habitudes et des espaces de travail ; les ouvriers et autres opérateurs du chantier construisent leur propre espace au fur et à mesure.
La cloison s’adosse à ces enjeux de déplacements et d’invention d’espaces successifs en impliquant le corps des protagonistes en passant d’un côté et de l’autre de la limite. Chaque semaine je photographie de dos, les acteurs du chantier regardant l'évolution de celui-ci et de leur espace de travail. Une mise en situation des personnes qui se mettent le temps du protocole, à distance et nous indiquent par la position de leur corps leur "état" vis à vis de ces conditions particulières de travail.
La figure de dos devient un autre révélateur de la personne et invite le regardeur à scruter les détails de l'arrière plan. Des milliers d'images constituent une documentation des étapes de la fabrication du bâtiment tout en devenant l'unique objet de connaissance totale de cette aventure humaine, de part et d'autre de la cloison.
La cloison, Le chantier des archives (2008), 64 affiches collées de chaque côté d’une palissade de 115 x 2800 cm.
La cloison est une structure en bois autoportante de 28 mètres qui traverse de part en part la salle d’exposition des Archives. Cette situation rejoue en quelque sorte la cloison qui a séparé de façon réelle et imaginaire le site des Archives pendant les trois années du chantier : les acteurs et les espaces du chantier d’un côté, le personnel et les espaces des archives de l’autre. Le temps du chantier a été vécu par les archivistes au rythme des déménagements successifs, de la réinvention des espaces de travail et des bruits des machines. Le temps du chantier a été vécu par une multitude d’équipes de travail avec une série de contraintes liées au calendrier, à la complexité de construire sans nuire à l’environnement de travail des archivistes et de coordonner les corps de métiers. Une pression qui s’est exercée sur les équipes des entreprises comme sur les intérimaires du jour.
La cloison oppose deux temporalités et traduit physiquement une séparation entre deux univers, deux imaginaires dont les frottements ont déterminé le chantier. Deux séquences visuelles dont le déroulement chronologique inversé induit une lecture en boucle du chantier, écho au recommencement permanent que l’archive de notre temps induit au sein de la société aujourd’hui. Monument symbolique mais dérisoire, la cloison met en tension les espaces de travail en mouvements, espaces contraints, absents des représentations institutionnelles, mais révélateurs, par la charge indicielle des images, de la complexité qui s’est nouée sur le site des Archives pendant trois années.
La cloison, le chantier des archives 2005-2008 (2008) 288 pages, livre format 14,5 x 19 cm.
Un livre conçu comme l’index de la situation de l’artiste dans le chantier (2005-2008)
Pendant près de trois ans, Arnaud Théval a suivi la réhabilitation des Archives départementales de Loire-Atlantique. L’artiste a régulièrement visité le chantier pour rencontrer le personnel et les ouvriers, leur proposant au passage de les photographier de dos, tournés vers leur espace de travail. Ces photographies sont accompagnées de notions écrites par un critique d’art et un ethnologue, questionnant la représentation des corps à travers l’histoire de l’art, ou mettant en lumière le travail des archivistes. En l’absence d’un sommaire et des numéros de page (remplacés par les dates de prise de vue de chaque photo), le livre invite à se perdre dans ce dédale de portraits et de notes, et à pénétrer un lieu habituellement clos, pour saisir, au plus près des corps et de l’activité intense qui y règne, les particularités de deux univers en mouvement.